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Xenakis: Zythos
Iannis Xenakis
Zythos  1996 #08mn
pour trombone et six percussionistes
En concert: me 23.3
23.3.2011 20h30 Pléiades
D.R.

En 1997, les dernières œuvres de Xenakis, composées avec difficulté en raison du mauvais état de santé du compositeur, ont toutes été créées en Angleterre. Zythos («boisson fermentée») était en fait une commande suédoise, mais la première représentation eut lieu à Birmingham en avril. Prévue pour la combinaison inhabituelle d’un trombone et six marimbas, cette pièce réunit Christian Lindberg (pour qui Xenakis avait écrit Troorkh en 1991) et l’ensemble de percussions suédois Kroumata. Ces musiciens, auteurs de la commande de Zythos, avaient créé les premières œuvres de Xenakis pour ensemble de percussions et étaient désireux d’avoir une pièce de lui spécialement écrite pour eux.

En tout point, Zythos est une pièce étrange. Le rythme est extrêmement lent (double croche = 25 MM env.) et la texture est souvent clairsemée. La partie du trombone, notée sur deux portées, est construite principalement de phrases erratiques aux mélodies largement disjointes (il n’y a pas de glissandi ou d’effets supplémentaires), avec des sauts pouvant aller jusqu’à trois octaves et au-delà. On pourrait être tenté de la comparer à celle du baryton de La Déesse Athéna, mais en fait les contours parcourent le registre complet de l’instrument, ne faisant aucune distinction systématique entre l’aigu et le grave, comme c’est le cas dans l’écriture de la partie du baryton. Au contraire, la double portée est une convention de notation, rendant les intervalles plus faciles à lire sur la page. Les parties des marimbas sont souvent traitées du point de vue spatial, se déroulant en phrases faisant office de contrechants du trombone et allant vers des passages scalaires. Étonnamment, les marimbas se réunissent, à plusieurs moments, sur une seule note ou sur un accord, répétant les notes comme une forme de ponctuation cadentielle. Le trombone ne se joint jamais à ces gestes qui servent pourtant souvent à déclencher une nouvelle phrase de la partie solo.

L’organisation des hauteurs ne confère aucune consistance particulière à intervalle ou modale, en dehors de l’accent remarquable mis sur les Fa. Sans trop vouloir interpréter la signification tonale de ce fait, les répétitions de notes aux marimbas caractérisent la hauteur aux mes. 7-8 (le trombone terminant sa phrase au même moment sur La 4), à la mes. 19 et aux mes. 20-21. Le Fa est également associé au aux mes. 13-14, et le trombone souligne aussi cela par de longues notes hautes soutenues (Fa 5 est la note la plus aiguë atteint par l’instrument). Il y a d’autres hauteurs qui sont à souligner, telles que Do à la mes. 3, Si à la mes. 16 et Do dièse lors de la cadence finale à la fin de la mes. 25, cela en conjonction avec un La 3 longuement tenu par le trombone, fournissant un lien par tierces au centre tonal de Fa. Il y a des moments intéressants dans la conduite de sa partie qui prêtent également à la musique un caractère fortement tonal à des moments particuliers. Un de ces moments se trouve à la mes. 8, déjà mentionnée, où les marimbas concluent la phrase du trombone en Fa répétés alors que le trombone tient un La. L’accord majeur induit glisse vers le mineur, le trombone commence la phrase suivante avec un La bémol 4 ; de même, à la fin, en dessous du La 3 tenu du trombone, les marimbas glissent du Do 3 répété au Do dièse 3. Ces inflexions tonales rehaussent certainement la musique, mais le traitement de ces gestes est emblématique plutôt que relationnel. Elles constituent un élément de plus qui contribue à définir la forme, en même temps que l’interaction entre le trombone et les marimbas, et les notes disjointes, conjointes/scalaires, tenues/répétées qui constituent les éléments de base.

En fin de compte, la réussite de Zythos tient à la richesse des timbres et à la complémentarité du cuivre du trombone et du bois des marimbas. Xenakis, qui indique ff pour le niveau dynamique global, est sensible à cette combinaison, insistant sur l’équilibre entre la résonance des marimbas et les sons clairs mais doux du trombone (indice concernant plutôt le choix des baguettes que le niveau de la dynamique). La taille de ces grands claviers oblige les six musiciens à se répartir au mieux sur la scène. L’effet d’échange de phrases d’un interprète à l’autre crée un ballet de sons mobile comme une toile de fond laissant libre cours à l’expression du caractère du trombone.

James Harley
Xenakis: His life in music