Issu d'une famille musicienne, Luciano Berio a eu son père pour premier professeur. Au conservatoire Verdi de Milan, il a étudié la composition avec Paribene et Ghedini, la direction d'orchestre avec Votto et Giulini. Il a subi l'influence de Dallapiccola, qui était son maître à Tanglewood (Etats-Unis). Certaines de ses premières oeuvres comme Nones (1954) sont d'inspiration sérielle.
En 1955, Luciano Berio fonde avec son ami Bruno Maderna le studio de phonologie de la R.A.I. (Radio-télévision italienne) à Milan. Il y réalise Thema
(Omaggio a Joyce) en 1958. Berio s'affirme comme un pionnier, un explorateur. A partir de 1960, il donne des cours à Darmstadt, à Dartington, au Mill's College (Californie), à Harvard, à l'Université Columbia. Il s'intéresse au rock et au folk, leur consacrant des essais et les mêlant dans le creuset de sa musique, laquelle est une musique libre, sans frontière. Berio a sondé, d'abord dans la clarté de l'intuition, puis prudemment, lucidement, des domaines originaux et longtemps oubliés de notre culture occidentale, en particulier celui de la voix.
La série des Séquences, pour instruments solistes, inventent, dans un jeu de manipulations et de métmorphoses, des formes nouvelles, et il en va de même de la série parallèle des Chemins. Voix ou instruments sont poussés à l'extrême limite de leur virtuosité, arrachés à leur tradition, élargis. Harmoniste raffiné dans Folk Songs, Berio se montre un maître de la technique de la variation dans la série Chemins, où des commentaires variés à l'infini laissent apparaître des « collages ». Passaggio (1962), Laborintus II (1965), Recital I (1972) sont des approches très personnelles du théâtre musical. Berio semble être imprégné de tout ce qui vit, pour le laisser réapparaître tôt ou tard. On rencontre dans Sinfonia (1968) l'amour de Mahler. Coro (1976) est sans doute l'un des sommets de son oeuvre, une anthologie de l'homme, de son aventure et de son paysage intérieurs. Les langues, les folklores, les styles y sont brassés avec violence et tendresse.
Pendant les années 80, Berio réalise deux grands projets lyriques, La Vera storia (1982) et Un re in ascolto (1984), projets tous deux conçus sur un livret d'Italo Calvino. Le but de ces deux opéras n'est pas de raconter une histoire, mais plutôt d'examiner les façons musicales et dramatiques selon lesquelles les histoires peuvent être racontées.
Berio ne cesse de dialoguer avec l'histoire musicale : il fait des orchestrations de pièces de Mahler ou Brahms, reconstruit la 10e Symphonie de Schubert (Rendering) ou l'Orfeo de Monterverdi (Orpheo II), et fait des allusions stylistiques et des citations directes dans ses propres oeuvres, technique déjà manifeste dans la Sinfonia de 1968.