Présentation
Électrique
billet en ligne
Photo Régis Golay © Archipel, 2013

La vraie révolution sonore du XXe siècle, nous la devons à l’électricité. L’électronique et l’informatique n’en sont que l’épiphénomène. Étincelle qui jaillit entre les électrodes d’un arc à souder, l’électricité a créé des alliages esthétiques imprévus. Musique, danse, installation, radiophonie, art et divertissement, fusionnant dans un même métal.

SOUS TENSION

Dimanche 17 mars, on ouvre grand les portes de la Maison Communale de Plainpalais où se déroulent des dizaines de courts événements qui s’enchaînent sans discontinuer. Le public circule librement dans les salles pour y découvrir Compost électronique, installation de Mario Lorenzo qui recycle nos déchets électroniques, et les étranges machines robotiques de Felix Thorn, brinquebalantes, ludiques et sonores. L’ensemble de percussions Eklekto joue Zappa, Lang, Pape, dans une débauche de pulsations.
Trois spectacles chorégraphiques rythment la journée. Les corps y sont mis sous tension. The Boiling Point de Daniel Zea/Lucie Eidenbenz est un cygne exécutant une pole-dance dans la vapeur de cent bouilloires commandées par Max-MSP. Levante de Carlo Ciceri/Lorena Dozio explore la lévitation d’un corps soumis à des champs électriques. Collision hétérogène de Marc Garcia/Amandine Bajou voit danser un couple sur un vieux piano dont l’amplification restitue les cris.

CHAISE ÉLECTRIQUE

Il l’avait d’abord appelé Electric Chair Music : Time & Motion Study II, de Brian Ferneyhough, est l’archétype de la musique cybernétique, l’instrument truffé de prothèses électriques, hyperconnecté. Le cyborg-violoncelliste Arne Deforce s’y grille, et crée aussi Foris de Raphaël Cendo qui emprunte son dispositif à Ferneyhough, ce qui permet de mesurer l’incroyable sophistication atteinte par la transformation électronique en quarante ans. L’électricité comme solution au problème de virtuosité ? La dernière mesure de Nomos alpha de Xenakis est injouable sans re-recording, Ruben Sverre Gjertsen en étend le principe dans sa création Psi pour violoncelle et électronique.

Enfin les « Papier à musique », courts métrages de Yann Pröfrock rappellent l’importance de la trace écrite dans ce monde de la connexion instantanée.
Tous ces événements sont présentés en continu : Y a de l’électricité dans l’ère, No Satisfaction, Corps sous tension, Chaise électrique, Papier à musique (MCP le 17.3 de 11h à 17h).

ELECTRIC KITCHEN

Le climax de cette journée exceptionnelle est l’hommage de Sebastian Rivas au mythique album de Miles Davis Kind of Blue. Cet enregistrement auquel participent, durant trois jours d’improvisations, John Coltrane et Bill Evans, eut un impact dépassant largement le monde du jazz. Rivas y voit la naissance du minimalisme, la fin du développement classique. C’est dans ce studio Columbia de New York en 1959, puis dans la Factory de Warhol dans les années 60, puis à la Kitchen où jouent les Répétitifs que naît ce pop-art nouveau achevant de brouiller les frontières du savant et du populaire.
Évoquant l’esprit de ces temples new yorkais, Rivas mêle ses créations, l’électronique, à des arrangements de Davis, Velvet Underground, King Crimson, Reich, Riley, La Monte Young dans un concert de l’ensemble Ars Nova (MCP le 17.3 à 17h).

NOUVEAUX COURANTS

Comme chaque année les étudiants des Hautes Écoles de Musique de Genève et Zürich présentent leurs créations dans les Ateliers Cosmopolites. Découverte d’une jeune génération pour qui l’électricité, l’électronique et l’informatique sont au cœur de la pensée musicale (Pitoëff les 20 et 21.3 à 18h). Puis les trois lauréats du 10e Concours Ferrari créeront leurs Hörspielen. Correspondances sonores écrites en 5.1 plutôt qu’à la plume d’oie (Pitoëff le 22.3 à 18h).

Marc Texier
directeur d'Archipel