Carlo Ciceri

šìr  (2016)  #09mn — création mondiale
pour soprano avec verres accordés et contrebasse
Photo Elsa Seignol © Royaumont 2010
En concert
Des rives, des rêves 2 - di 13.3 15h30

šìr est une pièce pour soprano et contrebasse sur le thème de l'incommunicabilité, ici abordé par le texte homérique de l'épisode de la rencontre entre Ulysse et les sirènes, selon la lecture de Foucault: «Les Sirènes sont la forme insaisissable et interdite de la voix attirante. Elles ne sont tout entières que chant. [...] Leur musique est le contraire d'un hymne: nulle présence ne scintille en leurs paroles immortelles; seule la promesse d'un chant futur parcourt leur mélodie. Ce par quoi elles séduisent, ce n'est pas tellement ce qu'elles font entendre, mais ce qui brille au lointain de leurs paroles, l'avenir de ce quelles sont en train de dire. Leur fascination ne naît pas de leur chant actuel, mais de ce qu'il s'engage à être. [...] Offert comme en creux, le chant n'est que l'attirance du chant,

mais il ne promet rien d'autre au Héros que le double de ce qui a vécu, connu, souffert, rien d'autre que ce qu'il est lui-même». (Michel Foucault, La pensée du dehors, 1966).

Mais la sirène (soprano) sait dès le premier instant, par son omniscience, son échec et sa mort qui en découle. Pour cette raison, son chant est incertain depuis le début, il se forme presque contre sa volonté puis se retourne contre elle.

šìr est donc une scène entre deux personnages qui dialoguent à travers leur corps: la soprano joue aussi des verres et la contrebasse utilise sa voix. Ils se parlent directement et jouent presque en contact, tournant leur profil au public.

Enfin, le titre se réfère au sumérien šìr, l'écho de l'ancien mot grec «seirèn», ce qui signifie chanter et qui résonne, sciemment, dans šìr-šìr, chaîne.

Carlo Ciceri