Thomas Kessler

5 + 5  (2017)  #15’ — création mondiale
pour cinq clarinettes contrebasses et cinq percussions

A chacune des cinq clarinettes contrebasse est attribuée un percussionniste comme partenaire de jeu. La composition trace un chemin initié par la forme d'interaction musicale la plus intime, pour terminer, du moins de manière apparente, par l'émancipation la plus extrême des deux musiciens sur leur instrument. Ainsi les cinq paires commencent par jouer de la «clarinette à quatre mains», sans pour autant renoncer à leurs techniques instrumentales respectives. Les clarinettistes, les yeux fermés, se concentrent sur la production du son en soufflant dans l'embouchure tandis que les percussionnistes exercent subtilement leur technique de frappe sur les clés de l'instrument. Ils produisent ainsi de courts impacts rythmiques et influencent également l'aspect timbral du son, d'une

manière jusque-là techniquement irréalisable par un seul interprète. De cette coopération étroite et intime se développe progressivement un processus d'éloignement. Les mouvements des percussionnistes se déplacent vers des cajons (instrument en bois), et deviennent peu à peu indépendants, alors que les clarinettes développent leur propre technique de jeu. Ce parcours d'un instrument à l'autre amène progressivement les percussionnistes vers leur instrument final, le glockenspiel. On atteint alors une combinaison instrumentale jusqu'ici inconnue des traités d'instrumentation classiques et qui ne comporte plus aucune sonorité commune. C'est justement alors que la différenciation instrumentale atteint son paroxysme que se dégage une force nouvelle, une force physiquement ou accoustiquement non mesurable, mais clairement perceptible à l'oreille de l'auditeur.

Thomas Kessler
Traduit de l'allemand par Alexandre Babel