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Née à Paris en 1926, fille de la traductrice Maria McDonald et du poète et journaliste Eugène Jolas, Betsy Jolas s'établit aux États-Unis avec sa famille en 1940. Là-bas, elle étudie l'harmonie et le contrepoint avec Paul Boepple, l'orgue avec Carl Weinrich et le piano avec Hélène Schnabel. Elle obtient le diplôme du Bennington College tout en poursuivant des activités de pianiste, choriste et organiste pour les concerts des Dessoff Choirs. Elle revient à Paris en 1946 pour compléter ses études avec Darius Milhaud, Simone Plé-Caussade et Olivier Messiaen au Conservatoire national supérieur de musique de Paris. De 1971 à 1974, elle remplace ce dernier, avant d'être nommée titulaire des classes d'analyse en 1975 et de composition en 1978. Elle enseigne également dans les universités américaines de Yale, Harvard, Berkeley, USC, San Diego, ainsi qu'à la chaire Darius Milhaud du Mills College.
Toute l'œuvre de Betsy Jolas, même purement instrumentale, est marquée par la vocalité et l'aspect déclamatif, comme en témoignent des pièces sans voix qu'elle appelle pourtant «opéras»: D'un opéra de voyage (1967); D'un opéra de poupée en sept musiques (1982); ou encore, Frauenleben (1982), neuf lieder écrits pour alto et orchestre. De la même façon, dans sa recherche sur le timbre vocal, elle va du Sprechgesang à l'usage de la voix
Tout en côtoyant l'univers effervescent de l'avant-garde de la génération d'après guerre — certaines de ses œuvres sont créées au Domaine musical —, Betsy Jolas reste une figure indépendante. Dans une époque où, comme elle l'affirme elle-même (Preuves, n° 178, décembre 1965), «il fallait voter sériel ou s'abstenir», elle résiste à l'emprise du sérialisme qui touche toute une génération de compositeurs. Betsy Jolas refuse la rupture et, dans son enseignement comme dans son œuvre, défend une conception de l'histoire comme évolution stylistique continue: les appuis issus de la tradition fondent l'acte d'invention. Jolas rend hommage à ses compositeurs de prédilection, Lassus, Monteverdi, Debussy, particulièrement honoré dans Tales of the summer sea (1977), ainsi que Schumann, source explicite de Frauenleben.