Œuvres

Franz Furrer-Münch
Skizzenbuch  1992-1993 #19mn
pour ensemble
Zeitsäume ■ Gegengestalten ■ Stille in Falten ■ Vom Rand zur Mitte nach aussen
Joué le 31 mars à 20h

D.R.

De Skizzenbuch (livre d'esquisses) on pourrait décrire superficiellement ces quatre mouvements comme une suite classique: Prélude, Allegro, Lentissimo, Finale. Or ce n'est absolument pas le cas. Décrire la recherche et la mutation dans le contexte des circonstances actuelles, voilà le contenu de cette oeuvre, qui laisse ouverte la manière dont elle se poursuivra. Le sujet en est la notion d'instant, qui est décrit par amplification ou par diminution. Le moment n'est donc pas simplement un bref éclair qui passe, mais peut comprendre des états plus longs, qui s'étirent dans le temps. Il vaudrait mieux parler d'états d'agrégation à propos des quatre mouvements du Skizzenbuch. Ce sont des moments sonores, qui se consument imperceptiblement, sans donner limpression d'être terminés.

Le premier porte le titre Zeitsäume. L'ambiguïté des connotations «perdre son temps» (Zeit versäumen) et «coutures du temps» (Zeitsäume) explique la nature double de la musique. Après un début quasi senza misura, où le violon est accompagné librement par la batterie, il se développe un champ complexe de pulsations, qui se retirent pour disparaître et semblent vouloir ramener le début, mais qui sont reprises tout à la fin.

La deuxième partie, Gegengestalten (Figures opposées) paraît beaucoup plus abrupte et hérérogène, plus orchestral aussi, dans un certain sens. La structure s'épaissit grâce à des trilles variées. Des éruptions troublent la tranquilité. C'est là un des rares passages véhéments et bruyants du compositeur. Le mouvement indique en tout cas que la musique n'a rien à voir avec la méditation autosatisfaite.

Le troisième mouvement, Stille in Falten (Silence en plis), revient au quasi senza misura des Zeitsäume, mais avec une texture homogène, un nuage sonore doré et brillant. «Les notes isolées ont leur individualité inhérente, au sens d'apparition - disparition», écrit Franz Furrer-Münch dans ses notices pour les interprètes. Le temps entre les notes, la genèse des sons, devient audible; le tout doit être exécuté aussi lentement que possible, à la limite «de ce qui est encore supportable».

Vom Rand zur Mitte nach aussen (Du bord au milieu vers l'extérieur), dernière partie du Skizzenbuch, suit effectivement le mouvement décrit dans le titre, sans dévider pourtant un processus mécanique ou graduel. L'interruption des pulsations ne permet pas de déterminer une direction nette. Au milieu, la musique oscille entre le repos absorbé dans ses pensées et les contre-rythmes capricieux. C'est dans ce mouvement que le caractère d'esquisse apparaît le plus clairement. Bien qu'arrêté, il reste ouvert, voire fragmentaire. Le geste final, un sifflement ascendant et tranchant de la flûte, a beau être catégorique, il donne plutôt l'impression d'un papier qu'on déchire.