Samedi matin, j’arrive au studio, il est neuf heures.
Il n’y a personne.
Mettre la lumière, seulement les spots et pas les néons qui font du bruit. Ouvrir la force technique, fermer la porte, couper le téléphone. J’allume la console de mixage qui envoie dans les amplis une impulsion électronique, les quatre haut-parleurs répondent séparément par un bruit bref de souffle très grave.
Il y a comme une présence.
Je n’ai rien écouté depuis hier soir, mon oreille est intacte, préparée par le sommeil de la nuit.
Je mets le mixage original sur le magnétophone master et m’assois au centre.
Télécommande : PLAY.
Au premier son je ferme les yeux. Instantanément le studio disparaît. Un autre lieu, un autre espace bien plus grand vient de s’ouvrir.
J’y pénètre.
J’ai la sensation très nette que la musique n’est qu’un « grand bruit », sculpté à l’intérieur de mille détails. Il s’ouvre comme un organisme vivant pour que mon écoute puisse s’y déplacer en tous sens. Très vite une relation magnétique s’établit et tous les sons constituant le grand bruit m’attirent vers un orient. J’accepte cette direction.
Plus tard, bien plus tard, je rejoins un point très éloigné dans l’horizon qui m’aspire. |