Festival Archipel 2010
Éditorial
Même / différent
Dedans / Dehors
Statistiques
Archipel 2010: Même / différent
© Paolo Pachini «Chute(s)»

Deux ans après la première du Pierrot lunaire de Schoenberg, œuvre fondatrice de la modernité, Max Kowalski, ami du compositeur, reprend quelques-uns des poèmes de Giraud pour écrire son propre Pierrot. L'œuvre est fascinante par sa proximité au célèbre modèle. Elle est cet «air du temps» d’où se dégage la figure originale du Pierrot schoenbergien. Réorchestrée par Johannes Schöllhorn, la musique de Kowalski y est avivée, contrastée, commentée avec humour, laissant apparaître le Cabaret là où n’était que le Salon. Cabaret encore avec les Songs de Weill et la création de Markéas au cours du concert d'ouverture par l'ensemble TM+ (19.3 20h, MCP).

Monument de l'avant-garde des années 70, la partition des Maulwerke de Dieter Schnebel offre, par son caractère graphique, l'opportunité aux chorégraphes Prisca Harsch et Pascal Gravat de traduire par le corps et le souffle cette musique notée comme une tablature articulatoire. Ce spectacle original, qui propose une double interprétation, musicale puis dansée, de la même œuvre, est présenté tout au long du festival en coproduction avec le Théâtre du Grütli par la Compagnie Quivala (20.3 20h, puis 8 représentations à la Black Box).

Autre événement d'Archipel 2010, Chute(s) réunit autour du vidéaste Paolo Pachini, trois fortes personnalités et autant de mondes musicaux : la beauté idéale de Michael Jarrell, la luxuriance sonore de Martin Matalon, les saturations furieuses de Raphaël Cendo. Ce spectacle, pour double projection vidéo, ensemble et électronique, illustre trois visions d’un archétype universel : l’idée de chute. Œuvre de vertige visuel et sonore, nous y éprouvons ce que ressent Icare, entre soleil et roche. Homme de cire fondue, privé de ses plumes d'ange. (musikFabrik, 22.3 20h30, Bonlieu).

Y a-t-il en musique une barrière du rösti ? En confrontant de jeunes compositeurs de Romandie et de Suisse alémanique, joués par des ensembles de ces deux régions, Vortex et Mondrian, Archipel pose la question du clivage esthétique qui s'observe actuellement entre mondes francophone et germanique. Aloe, Jaggi, Roth d'une part, Stauder, Ciceri, Treichel de l'autre, finalement réunis sous l'égide bi-culturelle de Gérard Zinsstag (25.3 20h, MCP). En partenariat avec la Société suisse de musique contemporaine, ce concert sera repris à Bâle, Berne, Zürich et Lausanne.

Ce thème du double, de l'identité, de la confrontation d'artistes sur un même sujet sera encore décliné lors de nombreux concerts. Klaus Huber et Brice Pauset puisant aux mêmes sources historiques de la musique ancienne composent un double portrait du poète Mahmoud Darwich (Contrechamps et Centre de Musique Ancienne, 23.3 20h, MCP). Crumb et Rihm s'emparent de la formation bartókienne du quatuor de pianos et percussions pour deux œuvres cyclopéennes où le monde intérieur s'oppose aux rumeurs de l'univers (Makrokosmos, 26.3 20h, RSR). Boulez et Naón proposent deux dédoublements de l'instrument : par l'électronique et l'espace (Namascae et HEM de Lausanne, 24.3 20h30, Château Rouge). Xenakis, Grisey, Cendo délaissent les subtilités rythmiques pour la force du martellement (CIP et Concours de Genève, 21.3 17h, MCP). Klaus Huber s'inspire du 27e Concerto pour piano de Mozart et des rythmes de la musique de Messiaen. En compagnie de deux compositeurs qui l'ont profondément marqué, Nono et Ligeti, il clôt une histoire où la modernité retrouve son passé (Arc-en-Ciel, 27.3 20h, MCP).

Enfin, deux variations burlesques sur le personnage de Sherlock Holmes, les films cultes de Tod Browning (The Mystery of the Leaping Fish) et de Buster Keaton (Sherlock Jr.) sont le sujet d'une relecture musicale de leur montage cinématographique par le compositeur Carlos Grätzer. En clôture du festival, ce ciné-concert rend la musique contemporaine accessible à tout public (Sillages, 28.3 17h, Victoria Hall).