Symphonie diagonale



Walter Ruttmann: Opus III

La musique existe-t-elle débarrassée des notes, de l’orchestre ? Peut-on la faire surgir des sons qui nous environnent, comme Scelsi la fait naître d’un son unique ? C’est-à-dire d’une écoute attentive du paysage sonore, en rejetant tout langage sédimenté par l’histoire.

Ce questionnement traverse la création contemporaine. Il justifie qu'aujourd'hui de nombreux plasticiens travaillent le son comme autrefois la pierre. Installateurs, vidéastes, compositeurs, artistes de la radio se rejoignent dans l'idée d'un art sonore mobilisant notre imagination, notre sens de l'espace, une musique qu'on se projette intérieurement comme un film.

Le concert des lauréats du Concours d’Art Radiophonique « Luc Ferrari » ; l'opéra-vidéo de Julien Taride ; les « cartes postales sonores » du compositeur Stefano Giannotti ; les instruments inventés du Canadien Jean-François Laporte, aborderont cette problématique.

Cette tentation d'un déplacement de l'art, de la musique vers la plastique du son, travaille symétriquement le cinéma et la vidéo. Dans les années 1920, le cinéma abstrait d'Eggeling, Ruttmann, Richter part en quête d'une « basse continue de la peinture ». Ils composent leurs films, inventent le montage musical. Transposée en sons par des compositeurs italiens, cette « musique optique » trace la diagonale de la peinture abstraite à la musique concrète.

« La réalité de notre siècle est la technologie » écrit Moholy-Nagy en 1922. C'est la machine, autrefois mécanique, aujourd'hui informatique, qui a permis ces révolutions. En homme de théâtre, Aperghis lui fait perdre son prestige de générateur invisible, incompréhensible, tout puissant. Voici la machine sur scène, se risquant à la séduction. Elle en perd toute logique. Machinations, dans une nouvelle production, clôt sur scène ce parcours diagonal du son à l'image, de l'art à la technique.

Marc Texier

Dernière modification de la page: samedi 10 février 2007. Ce site nécessite un écran 1024x768, javascript activé. Utilisez de préférence Firefox, Camino ou Safari, à la rigueur IE6.