1. Samuel Andreyev
  2. Georges Aperghis
  3. Alexandre Babel
  4. Stéphane Bissieres
  5. Nicolas Bolens
  6. Sylvano Bussotti
  7. John Cage
  8. Pierre-Albert Castanet
  9. Luigi Ceccarelli
  10. Marc Chalosse
  11. Jakub Ciupinski
  12. Pascal Contet-Wu Wei
  13. Riccardo Dapelo
  14. Xavier Dayer
  15. Basilis Del Boca
  16. Santiago Tomás Diez Fischer
  17. Agostino Di Scipio
  18. Roberto Doati
  19. Hugues Dufourt
  20. Benjamin Dupé
  21. Viking Eggeling
  22. Benjamin de la Fuente
  23. Fernando Garnero
  24. Stefano Gervasoni
  25. Stefano Giannotti
  26. Francesco Giomi
  27. Vinko Globokar
  28. Francisco Huguet
  29. Bryan Jacobs
  30. Sharon Kanach
  31. György Kurtág
  32. Jean-François Laporte
  33. Jacques Lenot
  34. György Ligeti
  35. Robert Mackay
  36. Gabriele Manca
  37. Luciano Martinis
  38. Ézéquiel Menalled
  39. John Menoud
  40. Laszlo Moholy-Nagy
  41. Paolo Pachini
  42. Emanuele Pappalardo
  43. Alessandra Carlotta Pellegrini
  44. Isabel Pires
  45. Tomi Räisänen
  46. Hans Richter
  47. Yann Robin
  48. Amadeo Roldán
  49. Fausto Romitelli
  50. Walter Ruttmann
  51. Nicola Sani
  52. Giacinto Scelsi
  53. Johannes Schöllhorn
  54. Denis Schuler
  55. Seweryn Scibior
  56. Samuel Sighicelli
  57. Sphota
  58. Klaus Hinrich Stahmer
  59. Marco Suarez
  60. Toru Takemitsu
  61. Julien Taride
  62. Fred van der Kooij
  63. Edgar Varèse
  64. Nadir Vassena
  65. Zhao Xiao-Sheng

Giacinto Scelsi
Compositeur (Italie, 1905-1988)




D.R.

Le 8 janvier 1905, à 11 heures précises, est né Giacinto Francesco Maria Scelsi, dans le petit village de Pitelli sur le territoire de la commune d’Arcola. Actuellement cette localité fait partie de la commune de La Spezia.

Une enfance singulière

Le père, Guido, à l’époque lieutenant de vaisseau, était issu d’une famille d’origine sicilienne qui se distingua lors des événements de l’unité italienne; la famille de la mère, Donna Giovanna d’Ayala Valva, était originaire de Tarente mais résidait habituellement dans le château de Valva en Irpinie. Le petit Giacinto, avec sa sœur cadette Isabella, passa une grande partie de son enfance dans ce château vétuste, où il reçut les premiers rudiments d’une instruction plutôt singulière : un précepteur lui donnait des leçons de latin, d’échecs et d’escrime.

En ce qui concerne l’éducation musicale, même à un âge avancé il aima se rappeler les nombreuses heures passées à « improviser » sur un vieux piano. Il ne semble pas qu’il ait fréquenté des écoles supérieures ni suivi aucune étude musicale régulière.Par la suite, la famille s’établit à Rome et ses talents de musicien furent aidés par des leçons privées données par Maître Giacinto Sallustio.

Premiers voyages, premières œuvres

Dans les années 1920, au sein du milieu aristocratique et mondain, il commença à fréquenter aussi les milieux artistiques, musicaux et littéraires de l’époque. Remontent en fait à celle-là les premières rencontres avec Jean Cocteau, Norman Douglas, Mimi Franchetti, Virginia Wolf, qui devaient l’initier aux mouvements culturels internationaux de son temps.

De cette période datent les nombreux séjours à l’étranger, tout particulièrement en France et en Suisse ; fondamental pour lui fut un voyage accompli en Egypte en 1927, où sa sœur résidait avec son mari; on peut le considérer comme son premier contact avec des musiques d’une autre conception. De cette époque demeurent quelques écrits imprégnés de surréalisme.

Sa première composition, Chemin du Cœur, date de 1929. L’année suivante il travaille à l’œuvre qui deviendra Rotativa et qui le révélera au monde musical international. En fait, donnée en création mondiale à la Salle Pleyel à Paris le 20 décembre 1931, sous la direction de Pierre Monteux, elle ne passa pas inaperçue malgré l’insatisfaction du jeune compositeur très sévère à l’égard de son œuvre, et attira sur lui l’attention de la critique ainsi que du monde musical.

Un acteur de la vie musicale italienne

Dans les années 1930 alternent des périodes de vie mondaine, de fréquents voyages à l’étranger, des problèmes de santé et une activité créatrice intéressante. Les interprètes de sa musique seront des personnalités marquantes du monde musical italien, parmi lesquels Willy Ferrero, Nilde Pignatelli, Massimo Anfiteatroff, Alba Anzellotti, Pina Pozzi, Ornella P. Santoliquido, F. Molinari etc. En 1937 il organisa à ses frais quatre concerts de musique contemporaine à la Salle Capizucchi : il fera exécuter des œuvres de jeunes compositeurs italiens et de très nombreux étrangers, parmi lesquels Kodály, Meyerowitz, Hindemith, Schoenberg, Stravinsky, Chostakovitch, Prokofiev, Nielsen, Janácek, Ibert etc., alors presque tous totalement inconnus en Italie.

Goffredo Petrassi l’aida à organiser ces manifestations, ce sera le début d’une longue amitié. Ces concerts ne durèrent pas longtemps à cause de l’entrée en vigueur des lois raciales, qui empêchaient dans la pratique de jouer des compositions d’auteurs juifs, que Scelsi n’accepta pas et qui l’éloigna encore plus de l’Italie. On peut faire remonter à cette période son intérêt pour les autres formes de composition, par exemple le dodécaphonisme dont il reçut les premiers rudiments d’un élève de Schœnberg, le viennois Walter Klein.

Simultanément il s’intéressa à la théorie de Scriabine dont il eut connaissance directement par le Docteur Egon Kœhler qui le soigna pendant un certain temps; c’est probablement ce même docteur qui l’initia à la chromothérapie. Il ne faut pas sous-estimer son intérêt pour les théories musicales steineriennes et pour le curieux monde qui gravitait autour de Monte Verita.

Scelsi en Suisse

Au moment de l’entrée en guerre de l’Italie en 1940, il se trouvait en Suisse où il resta pendant toute la durée du conflit et où il se maria avec Dorothy Kate Ramsden, de nationalité anglaise. Malgré les années difficiles, il poursuivit une intense activité culturelle aussi bien poétique que de compositeur et commença un travail de type théorique fondamental pour les développements futurs de sa musique. Il ne refusa pas, quand il le put, d’aider les membres de la communauté intellectuelle internationale persécutés à trouver refuge en lieu sûr.

Au cours de ce séjour forcé il y eut aussi des exécutions de ses œuvres, par exemple son Trio à cordes, joué par le Trio de Lausanne dirigé par Edmond Appia et plusieurs pièces pour piano interprétées par Nikita Magaloff. À la fin du conflit, il retourna en Italie; il s’établit à Rome où vivait sa mère adorée, son père et sa sœur Isabella. Il revint de Suisse en proie à une profonde crise psychique qui ne l’empêcha pas d’achever quelques œuvres déjà commencées : à Paris en 1949, son Premier Quatuor à cordes joué par le Quatuor de Paris, et pour la première fois La Naissance du Verbe sous la direction de Roger Désormières. Suivront des années très tourmentées coïncidant avec une crise irréversible de type créatif-musical, qui le porteront à des limites très dangereuses; il trouva une issue dans la poésie, dans les arts visuels et dans son intérêt pour le mysticisme oriental et l’ésotérisme.

Poésie - peinture - philosophie

Chez l’extraordinaire éditeur Guy Levis Mano à Paris sortiront trois petits livres de poésie Le poids net, L’archipel nocturne et La Conscience aiguë, qui durant de nombreuses années furent ses seules œuvres éditées; dans une clinique suisse spécialisée dans les maladies nerveuses où il fut hospitalisé un moment, il donna une série de conférences sur la créativité d’une ouverture et d’une clairvoyance telles qu’on peut les considérer comme des documents prémonitoires de son évolution créatrice. Son intérêt pour les arts visuels, en particulier l’art Informel, trouvera un cadre approprié pour lui dans l’activité de la « Rome-New York Art Foundation » dirigée par l’américaine Frances Mc Cann, sa compagne à l’époque. La profonde amitié qui le lia à Henri Michaux eut probablement aussi une fonction de stimulation dans la recherche de ce qu’il considéra toujours comme de la plus vitale importance: la musique. Cela coïncidera avec son acceptation désormais active des philosophies orientales, des doctrines Zen, du Yoga et de la problématique de l’Inconscient.

À la recherche du « son sphérique »

Également dans le champ musical commencent des années de recherche et d’expérimentation. L’instrumentation de figures déterminées par le hasard, l’improvisation sur des instruments traditionnels utilisés d’une manière non orthodoxe, l’utilisation de nouveaux instruments comme l’ondioline, capables de reproduire les quarts et huitièmes de ton, mais surtout la manière d’improviser en état de transe, nous ont révélé ses œuvres les plus puissantes. Sa manière totalement originale de procéder dans ses compositions l’exposa à des critiques féroces et une hostilité qui ne se calmeront même pas à sa disparition mais, au contraire, se manifesteront avec une vigueur et une rancœur nouvelles. En fait, dans l’impossibilité psychique et physique d’un travail minutieux de transcription de ses improvisations régulièrement enregistrées sur bande magnétique, il devait faire appel à des transcripteurs qui devaient avoir comme qualité première l’oreille absolue ; naturellement ceux-ci travaillaient sous sa direction. Il appliqua le même procédé également à sa création poétique et c’est ainsi que naquit le poème visionnaire Le rêve 101, le retour.

Le travail ne s’achevait pas avec la transcription de la musique enregistrée;étaient précisées des instructions minutieuses pour l’exécution, afin de donner aux sons les valeurs correspondant à sa volonté, des sourdines pour les instruments à cordes réalisées selon ses plans, des instruments à cordes traités comme des percussions, des filtres sonores pour déformer le son des instruments à vent, l’utilisation de la voix en tant que rupture de la structure sonore ou encore des enregistrements préexistants utilisés en tant que tracés pour l’exécution. Le plus original d’ailleurs était sa méthode d’orchestration qui consistait à associer des instruments semblables déphasés d’un quart de ton (ce qui produit àl’exécution une vibration mystérieuse et d’imprévisibles effets de battements). Le travail de finition porté en avant par la collaboration avec les interprètes ne fut pas secondaire.

Cent interprètes - une seule note

En fait ses œuvres, étant donné leur difficulté d’exécution, trouvent leur premier obstacle dans l’interprétation. Seuls de rares musiciens de très haut niveau se préparèrent à étudier sa musique et certains passèrent dans ce but de longues périodes accueillis dans sa maison. Voici le nom de quelques-uns d’entre eux ayant eu la possibilité de vivre cette extraordinaire expérience : Devy Erlih, Michiko Hirayama, Frances-Marie Uitti, Ferdinando Grillo, Geneviève Renon, Alina Piechowska, Carlo Porta, Joëlle Léandre, Massimo Coen, Carol Robinson, Carine Levine, Marianne Schrœder, Stefano Scodanibbio etc. Finalement il avait trouvé un univers sonore qui lui correspondait et au même moment il commença un processus d’occultation de sa production antérieure, qu’il considéra désormais comme académique. La révélation de cette nouvelle phase fut l’exécution des Quatre pièces sur une note exécutées au Théâtre National Populaire de Paris en décembre 1961, sous la direction de Maurice Le Roux.

Certainement tous ces éléments devaient déranger le monde académique officiel qui se montra toujours plus hostile à son égard, d’autant plus exaspéré par le succès toujours plus grand de sa musique à l’étranger. Il ne manqua pourtant pas non plus de supporteurs en Italie, en premier lieu le compositeur Franco Evangelisti à qui on doit les rares exécutions des œuvres scelsiennes réalisées presque exclusivement dans le cadre du festival de Nuova Consonanza.

L'ermite romain

Scelsi passa les dernières années de sa vie à son domicile romain de la Via San Teodoro 8, devenu désormais le point de chute de ses amis et admirateurs. De cette période remonte la publication de ses ouvrages théoriques et littéraires par la maison d’édition « le parole gelate » et le début de la publication systématique de sa considérable production musicale par les Éditions Salabert à Paris sous la direction de Sharon Kanach.

Il ne voyagea plus qu’à l’occasion de concerts qui lui étaient dédiés et eut ainsi l’opportunité d’écouter au moins une fois la musique qu’il avait portée en lui pendant tant d’années. Le dernier concert consacré à ses compositions où il fut présent se déroula le 11 avril 1988 à La Spezia, sa ville natale, où il n’était jamais retourné depuis les premières années de son enfance. Il cessa toute communication avec le monde extérieur le 8.8.88 et s’éteint dans la matinée du lendemain.

Luciano Martinis, traduit de l'italien par Irène Assayag

Catalogue des éditions Salabert

Site: www.scelsi.it

Dernière modification de la page: dimanche 4 février 2007. Ce site nécessite un écran 1024x768, javascript activé. Utilisez de préférence Firefox, Camino ou Safari, à la rigueur IE6.